vendredi 31 janvier 2014

Bilan de la traversée Las Palmas (Canaries) - Palmeira (Cap Vert)

Mardi 21 janvier :

Après avoir déjeuné et téléchargé une nouvelle fois les fichiers météo pour la semaine à venir sur ZyGrib et Ugrib, nous larguons les amarres à 15h. Cette navigation de 800 milles se fait en générale en 5 à 7 jours. Nous sommes contents de partir avec le soleil et de dire au revoir à ce dernier bout d’Europe. 





Pleins d’espoir nous sortons la GV puis le gennaker et filons jusqu’à 10 nœuds sans houle mais passé une heure, le vent tombe sous les montagnes sud et il nous faut remettre les moteurs. Le tableau des quarts est refait. Heureusement que nous passons de plein jour une large zone de pisciculture, non signalée sur la carte et non balisée.



La nuit est très calme, nous avons éteint le moteur bâbord (la patate) puis le tribord (l’horloge suisse) pour avancer au génois. Péniblement nous avançons dans la nuit autour de 4 nœuds mais au moins c’est tranquille et chacun peut s’acclimater et dormir paisiblement.

Mercredi 22 janvier :

A 13h, nous avons toujours peu de vent et notre allure oscille entre 4 et 10 nœuds sous GV et génois = vent arrière / grand largue. C’est grand soleil. Nous sommes obligés d’empanner à peu près toutes les 3 heures vue l’indécision et la faiblesse du vent. Nous avons une petite houle désordonnée mais qui nous laisse tranquille.

Gennaker (par maxi 15 noeuds de vent)

Grand voile (GV)
Vers 15h, le lève se lève : 15 nœuds apparents (vent apparent = vent réel – vitesse du bateau), régulier. Toujours peu de houle et on file à 8 nœuds. Parfait ! Quelle belle navigation. Stéphane fait une sieste de 2h. A 17h, on sirote un thé au soleil qui nous offre 21°. Notre vitesse moyenne a été de 5,2 nœuds sur les dernières 24h.

Jeudi 23 janvier :

Je prends mon quart à 3h, nous avançons autour de 5,5 nœud, toujours vent arrière. Désormais, de jour comme de nuit la température extérieure est autour de 20 degrés. Il fait bien noir car les nuages nous cachent la lune et les étoiles. Dans ces moments, les sens autres que la vue se développent et le corps prend le rythme du bateau. Comme d’habitude, je joue un peu à Candy Crush sur mon Iphone puis je lis à la lampe frontale (rarement pendant les quarts), je médite (eh oui…), et je m’assoupis (d’où la nécessité de régler une alarme tous les quarts d’heure). Certains mangent aussi mais pas moi. Il en serait sans doute autrement si nous devions faire des quarts plus longs et dehors à la barre.

En début de matinée le temps change. On savait vu les fichiers grib, que le vent allait bien monter… Qu’est-ce que la météo va nous réserver… ? A 10h, la houle est de 3 mètres ; nous avons vent arrière à 20 nœuds. Tout l’après-midi le vent monte et la houle forcit. Les rafales atteignent 30 nœuds et M’AlyséOci enchaine les surfs sur les vagues qui parfois viennent déferler et cogner entre les coques en faisant un bruit impressionnant.

La soirée et la nuit se poursuivent sur le même mode. Nous sommes surpris de ne pas être vraiment malades. Pour moi ça va car en fait je ne suis quasiment jamais malade. Mais pour le capitaine, c’est un peu différent : à 21h la GV est affalée et un demi-génois est laissé au vent. Comme à chaque fois qu’il doit faire des manœuvres par gros temps en pied de mât, ça se finit par un vomi dans le seau…


Vendredi 24 janvier :

La nuit est vraiment difficile. Si nous avançons de 5 à 6 nœuds, il faut subir des creux de 6 mètres et des rafales de 35 nœuds ! Donc du force 7 sur l’échelle de Beaufort !! J’avoue que moi j’ai eu un peu peur. Mais la qualité du bateau combinée à la prudence (veille et réduction de la toile), nous prouvent que nous sommes loin des limites. En journée, il fait grand soleil. Dommage que l’on ne puisse pas profiter de l’extérieur, ni mettre en route le dessal, ni pêcher à la traine… Notre vitesse moyenne est de 6 nœuds, nous avons franchi la moitié de la distance à parcourir (400 milles).

22h : il fait nuit depuis 19h30 UTC. Stef avait le mal de mer et moi mal à la tête. On s’est couché un peu vers 19h. Pour éviter au capitaine de penser au mal de mer, je lui ai parlé des enfants, de ce qu’on aurait été en train de faire avec eux quatre à la maison  si nous avions toujours notre vie à terre.

La houle est moins forte cette nuit. Mais on surfe beaucoup. On est entre 5 et 6 nœuds de moyenne, au large de Cap Blanc en Mauritanie.

Samedi 25 janvier :

Je prends mon quart à 7h. Depuis 2h, ça secoue à nouveau. Avec Jean-François qui va se coucher, on discute deux minutes et on se félicite encore du bateau et des quarts à l’abri. En début d’après-midi le soleil est encore au rendez-vous. Mais c’est bien le seul : aucun autre bateau à l’horizon ni aucun animal marin… La journée passe est maintenant on a hâte d’arriver.


 Chacun grignote comme d’habitude en journée et la nuit ce qui lui fait envie : tortilla de pomme de terre espagnole, muesli et bretzels. Le bretzel est LE gâteau du marin ! Assurément le petit gâteau salé alsacien peut être consommé et surtout digéré en toute circonstance. Le midi on conserve le repas en commun mais forcément il est surtout à base de pâtes et de riz. Savez-vous que si dans le temps les marins européens attrapaient le scorbut c’est parce qu’ils consommaient des aliments conservés par salaison ? Les polynésiens, assurément les plus grands marins, ont toujours parié sur la noix de coco qui offre eau, lipides, fibres…etc.

Dimanche 26 janvier :

Stef et moi prenons nos deux quarts ensemble, démarrage à 1h. A 3h, le vent et la houle montent. Toute la journée, la houle désordonnée va alternativement forcir puis se calmer. Toute la journée aussi le capitaine est malade. Il l’aura plus ou moins été tout au long de cette navigation et ça le contrarie. Ainsi la phrase suivante restera culte, prononcé au petit matin, dans la cabine : « Est-ce que tu peux fermer ce hublot, ça sent la mer ! ».


 Lundi 27 janvier :

Tout le monde est de bonne humeur car on sait que l’arrivée est pour aujourd’hui. On va guetter pendant des heures la terre que l’on ne distinguera que tardivement dans le ciel laiteux. A 10h30, nous sommes à 20 milles du port de Palmeira sur une des îles au vent du Cap Vert, les « Barlaventes ». Le ciel est gris, il y a peu de vent, il fait 22 degré. Chacun attend.



Heureusement, on a le pavillon du Cap vert à faire, d’après les infos envoyées par SMS de Juliette. Il faut avouer que l’on pensait avoir le modèle sur le guide nautique de l’Atlantique mais finalement non… Zut ! Notre pavillon fait à deux se révélera presque juste.




Vers 15h, nous entrons dans la baie de Palmeira et d’emblée nous resentons le dépaysement en distinguant la nonchalance et les couleurs du village. Ici, le mot créole prend tout son sens, sur ces cailloux arides, et ici à Sal, entre Afrique, Brésil et Portugal… D’ailleurs, le bateau est rouge de sable. Que va nous réserver le pied posé à terre ?





Finalement, cette navigation aura été difficile, comme la précédente. Si les enfants avaient été là, il est évident que vu la météo que nous avions prises, nous aurions attendu une semaine. Mais vu notre calendrier, nous avons pris la mer. 

Si nous avons un enseignement à tirer c’est que les fichiers grib de l’Atlantique ne sont pas aussi fiables que nous l’attendions ! Il faut rajouter 5 nœuds aux estimations et le vent s’est levé plus tôt que prévu. D’un autre côté, les fichiers grib ne peuvent être que perfectibles puisqu’ils sont élaborés à partir de modélisation mathématiques… Il faut donc toujours essayer de bien voir une approche globale des choses : globale du temps sur une certaine échelle, globale des éléments… Stéphane a aussi compris le système de « pulsions » des Alizés qui démarre aux Canaries quand il a étudié plus avant la période venteuse que nous avons connue.


Allez hop, profitons maintenant de Cabo Verde avant la Transat !

1 commentaire:

  1. Magnifique drapeau :-D !
    C'est chouette on voyage depuis son siège de bureau et avec le mal de mer en moins ^^
    Cette partie de voyage n'était pas vraiment de tout repos!! J'espère que vous serez plus tranquille pour la transat!

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